Les Etablissements Schneider
Economie sociale
La maison de retraite
Après un historique du Creusot de 1253 à 1912, cet ouvrage (non signé) présente les "bienfaits" apportés par les Schneider à la population du Creusot. Véritable bible du paternalisme, on ne pourra réellement apprécier son contenu qu'en faisant un rapprochement avec le livre de Jean-Baptiste DUMAY : Un fief capitaliste.
Documents
et textes d'après
"Les Etablissements Schneider - Economie Sociale"
1912 - Lahure Ed. |
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LA MAISON DE RETRAITE
La Maison de Retraite du Creusot, inaugurée le 4 janvier 1887, a été fondée et dotée par Mme veuve Eugène Schneider et par M. et Mme Henri Schneider.
Cet établissement est destiné à donner un asile confortable à des vieillards des deux sexes - on peut en admettre actuellement 80, - à adoucir, dans une familiale atmosphère de paix et de repos, l'isolement de leurs vieux jours, à leur faire oublier un peu, par des soins dévoués, les misères physiques trop souvent inhérentes à leur âge.
En principe, il recueille les anciens ouvriers des Établissements Schneider, leurs femmes et leurs veuves; mais, s'il reste des places vacantes, on y reçoit aussi les indigents de la ville, et même du canton du Creusot, n'ayant pas eu d'attache avec le personnel. Les admissions sont prononcées par une Commission Administrative chargée de la gestion générale de la maison; le service intérieur est confié aux Religieuses de Saint-Joseph de Cluny : elles assurent elles-mêmes les soins à donner aux pensionnaires et veillent à la bonne tenue de la maison. La liberté de conscience est garantie à tous les pensionnaires.
Pour les admissions, on doit toujours se conformer à l'esprit qui a inspiré le nom même de l’œuvre. C'est une « Maison de Retraite » et non un hospice d'incurables ou un hôpital : on n'accepte donc que des vieillards encore assez valides. Bien entendu, si, pendant leur séjour, des infirmités se révèlent ou s'accentuent, on les garde, sauf cas de force majeure.
L'âge d'admission est fixé à soixante ans au minimum ; toutefois, pour les ouvriers des Établissements, cet âge peut, à titre exceptionnel être abaissé à cinquante-cinq ans. En pratique, ces exceptions sont rarement nécessaires et, actuellement, un seul pensionnaire a moins de l'âge normal. Dans la plupart des cas, les admissions n'ont lieu que bien après soixante ans et souvent aux environs de soixante-dix ans.
Parfois, les deux membres d'un ménage entrent en même temps à la Maison de Retraite : ils peuvent, s'ils en expriment le désir, et dans la limite des locaux disponibles, être réunis dans des chambres réservées dans ce but.
Les pensionnaires doivent apporter un trousseau ; mais, bien souvent, dès leur admission, il faut mettre à contribution le vestiaire de la Maison de Retraite, qui, pendant toute la durée de leur séjour, reste entièrement chargé de leur entretien.
Dans la mesure de leurs forces et de leur bonne volonté, les vieillards sont occupés aux travaux de la maison, sans que cela devienne jamais une obligation pour eux. De fait, les plus robustes sont toujours heureux d'aider les Sœurs à entretenir le jardin - leur orgueil - la basse-cour et l'étable. Ils y ont d'autant plus de mérite qu’ils jouissent, par ailleurs, d'une grande liberté. Sauf en cas de maladie, ils peuvent sortir tous les jours, pendant l'après-midi, et, deux fois par semaine, pendant toute la journée. A ceux qui ont des enfants établis au loin, et auxquels leur état de santé le permet, on accorde un congé de famille de quelques jours. C'est là une latitude dont ils usent fort peu et ceux même qui demandent à en bénéficier reviennent parfois avant le terme du délai autorisé, tant l'accoutumance leur a rendu chère leur maison de retraite. Du reste, trois fois par semaine, ils peuvent y recevoir leurs parents et leurs amis.
Si les pensionnaires sont bénéficiaires de quelque rente, pension, ou autre revenu, ils touchent entièrement le montant de ces sommes s'il n'atteint pas cent francs. Au delà de ce chiffre, ils conservent la disponibilité de la moitié de leurs rentes ou pensions jusqu'à un maximum de deux cent cinquante francs. Le surplus est versé à la Maison de Retraite pour contribuer à leur entretien.
Un médecin est spécialement désigné pour le service de la Maison de Retraite. Les opérations chirurgicales sont assurées par l'Hôtel-Dieu.
Lorsqu'il survient un décès, la Maison de Retraite pourvoit à tous les frais d'inhumation. Grâce, il est vrai, à l'inlassable dévouement des Sœurs, aux soins attentifs qu'elles prodiguent à leurs « enfants », comme elles se plaisent à appeler les vieillards, la mortalité est faible et nombre de ces fidèles serviteurs des Usines peuvent jouir, pendant de longues années, de la vie calme et exempte de préoccupations qui leur est faite : ceux qui ont dépassé leurs quatre-vingts printemps sont loin d'être l'exception.
Aussi les demandes d'admission sont-elles nombreuses et, pour les hommes surtout, il est rare qu'un lit reste longtemps inoccupé.
Depuis sa fondation, la maison a abrité 397 vieillards (dont 214 hommes et 183 femmes).
La Maison de Retraite est établie, au Creusot, sur les hauteurs de Saint-Henri. Elle comprend un grand corps de bâtiment central et deux ailes, dont l'une est occupée par les hommes, l'autre étant réservée aux femmes. Deux nouveaux pavillons viennent d'être ajoutés récemment. Toutes les constructions ont été faites aux frais de MM. Schneider, qui y ont consacré plus de 400 000 francs.
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Chaque aile comprend cinq chambres-dortoirs à six lits, trois chambres à deux lits et une chambre à un lit (dans les nouveaux pavillons), ainsi qu'une infirmerie de deux lits. Au premier étage, quelques chambres à deux lits sont destinées aux ménages. Les deux réfectoires sont dans le bâtiment central. Des galeries-promenoirs règnent devant toutes les chambres et, de plus, les hommes ont à leur disposition une salle pour fumer. Bien entendu, tous les jours de beau temps, le jardin est le lieu de promenade normal des vieillards. Le grand vestibule d'entrée sert de parloir pour les visites des familles.
Au cours de ces dernières années, on a fait procéder à de nombreuses améliorations: en particulier, l'on a installé le chauffage central et l'éclairage à l'électricité.
En dehors de la partie réservée aux pensionnaires et des quelques pièces nécessaires à l'Administration, il faut signaler la communauté et l’oratoire des Sœurs, la lingerie, le vestiaire de réserve et la cuisine. Dans les dépendances, on trouve une buanderie, une étable à vaches, une écurie à porcs et une basse-cour.
Une visite à la Maison de Retraite ne laisse point sous cette impression de déchéance douloureuse et de solitude dans la vie, que l'on éprouve souvent au milieu des collectivités de vieillards appartenant à des milieux très modestes; elle vous enveloppe plutôt d'une ambiance de paix, de sécurité et de consolation. |
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